mardi 6 novembre 2012

Je veux bien y croire

On parlait de sa fille allongée dans ce petit lit, son autre fille abandonnée en panique à la maison quand la première avait commencé à s'étouffer, de son mari, qui doit dormir la nuit, et d'elle qui ne dort pas, fatiguée, c'est tellement dur, quand les larmes ont perlé. Les siennes. Je lui ai proposé de garder sa toute petite le temps qu'elle aille respirer, boire un jus d'oranges frais, celui des lendemain de garde, et regarder le soleil qui ne brille pas en pédiatrie. L'idée de rester dans cette chambre calme quelques minutes, loin de l'agitation des blouses qui se bousculent dans les couloirs, se bousculent dans le bureaudesmédecins, se bousculent autour des patients me tentait bien. "De toute façon, elle ne va pas vous lacher", elle a dit. Et de voir cette minuscule petite chose endormie contre ma main, ses doigts aggripés autour de ma montre, et sa maman qui souriait un peu, derrière les cernes, les larmes ont perlé. Les miennes.
On dira que c'était la fatigue, on dira.

Je vais aller voir la mer quelques jours et quand je le dis j'ai l'impression de parler de quelqu'un d'autre. Ca ne peut pas être moi, avec lui, comme si de rien n'était mais que tout avait changé. Je ne peux plus m'endormir sans serrer un pull dans mes bras et quand je lis la feuille d'admission des enfants à l'hôpital je réalise que moi aussi, avec 20 ans d'écart, j'ai un objet transitionnel. Je parle à des papas dans d'autres pays, je rencontre des mamans qui ont fait des bébés toute seule, j'explique aux enfants comme écouter leur coeur et ils l'entendent, mais oui pour de vrai, je berce des nourrissons pendant que leurs parents vont faire leur admission, je dis aux chefs que oui oui je sais faire alors que pasdutoutdutout, alors je dois assurer ensuite, et parfois j'y arrive. Parfois, j'y arrive, moi. Je m'en sors.

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